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E-sport

Rencontre avec les Sailor Scouts, une équipe d’e-sport

ROSI Media était présente à la DreamHack de Montréal 2019 et a eu la chance de discuter avec les joueuses montréalaises des Sailor Scouts.

Les sailors scouts à DreamHack Montréal 2019
Crédit photo: ROSI Media

L’équipe montréalaise, Sailor Scouts, composée uniquement de femmes, participait à la DreamHack Montréal 2019 et on a discuté avec trois d’entre elles: Stéphanie « IDDQT » Yan, Naeda Samedy « Tachikoma » Arthur et Camille « Quake » McWilliams.

Comment vous êtes-vous rencontrées et avez créé votre équipe? 

Stéphanie : Ça a commencé quand le jeu Overwatch est sorti. C’est un FPS (First Person Shooter, NDLR) dont la moitié des héros jouables sont des femmes. J’ai adoré cette idée et j’ai commencé à jouer. Puis j’ai vu qu’un bar d’e-sport avait ouvert au centre-ville : le Meltdown. Il commençait à faire des soirées Overwatch le vendredi. J’y suis allée seule et j’étais la seule fille dans tout le bar mais j’ai vraiment eu une belle expérience. J’y suis retournée chaque vendredi et là j’ai rencontré une autre fille, puis je lui ai demandé si on pouvait jouer ensemble. Chaque semaine il y avait de plus en plus de filles, assez pour faire une équipe complète. On a participé au tournoi du vendredi et on a gagné ! On s’est alors dit qu’on pouvait continuer et voir s’il y a d’autres tournois ou compétitions.

Naeda : J’ai commencé à jouer à Overwatch sur le PC de mon frère. Ce jeu-là était vraiment fun et c’est la première fois que je jouais à un FPS. Avant, je jouais plus aux jeux stratégiques comme Civilization. Je gamais aussi pas mal sur PS4 à Assassin’s Creed par exemple, et c’est Overwatch qui m’a amené à acheter un PC. Puis j’ai découvert Discord [application de communication avec plusieurs serveurs permettant de parler avec des personnes ayant le même centre d’intérêt, NDLR]. J’y ai vu une annonce, que Stéphanie avait postée, disant qu’elles étaient plusieurs filles au Meltdown et qu’elles cherchaient des joueuses. Mon frère m’a alors demandé pourquoi je n’envoyais pas un message, ce que j’ai fait. C’était la première fois que j’allais au Meltdown et j’y étais seule. Je ne connaissais personne. Mais j’y ai trouvé mon équipe.

Camille : J’étais la première recrue de la team officielle. J’ai commencé grâce à mon frère qui travaille chez Ubisoft avec une des fondatrices. Elle avait passé le message à l’interne et mon frère me l’a communiqué. Il m’a dit «Je sais que tu joues à ce jeu là. Il faudrait que tu ailles essayer». J’ai envoyé un message et on m’a informée que les «try outs» [les essais, NDLR] avaient lieu deux jours plus tard. Ils faisaient en plus un bootcamp avec d’autres filles qui voulaient rentrer dans l’équipe au MVA, Mixte Virtual Art, une place qui n’existe plus, et où on pouvait payer un abonnement mensuel pour utiliser un ordinateur.

Stéphanie : Ce qui est vraiment «cute» en plus c’est que les deux frères sont coachs dans l’équipe maintenant. 

Camille : Le frère de Naeda est le coach Overwatch et le mien est le coach Starcraft, qui est la nouvelle branche de l’équipe.

Est-ce que vous étiez des gameuses avant sur d’autres jeux?

Stéphanie : Je jouais un peu à Counter Strike et World of Warcraft 3 mais c’est vraiment l’idée de jouer une femme dans un FPS qui m’a intrigué. Toutes les femmes ne sont pas juste sexy. Elles sont toutes belles, bien sûr, mais il y a plusieurs représentations, avec différentes morphologies, éthnies et orientation sexuelle. C’est vraiment ce qui nous a toutes attiré pour Overwatch. 

Camille : Je joue à des jeux vidéo depuis tellement longtemps que je ne me souviens plus quand j’ai commencé. Puis c’était toujours des personnages masculins comme dans Halo 3 ou Call of Duty, même si je suis trop cool pour ce jeu, Starcraft 2, Les Sims même si on peut rencontrer personne, ou Gear of Wars. Donc arrivé au bootcamp, j’ai trouvé ça vraiment cool de voir des filles jouer. Et tout a cliqué. J’ai donc été acceptée il y a deux ans en mai dans l’équipe. 

Justement, comment se passe votre vie d’équipière et est-ce que vous avez des entrainements?

Camille : Oui, il y a des entrainements. On a moins de joueuses parce qu’on veut une équipe féminine à Montréal, qui joue à Overwatch, capable de se déplacer au moins deux fois par année pour DreamHack et ETS [Lan ETS, l’autre événement e-sport montréalais, NDLR]. Puis des filles qui regroupent tout ça, ça devient de plus en plus rare. Surtout il faut avoir un certain niveau et il y a vraiment beaucoup de personnages dans Overwatch et beaucoup de filles jouent les mêmes personnages. Donc il faut trouver des joueuses qui sont capables de jouer des rôles comme Tank ou DPS.

Stéphanie : Notre position est de rendre l’e-sport plus accessible. On fait des entrainements deux fois par semaine mais on a aussi des jobs à côté. 

Est-ce que vous jouez aussi sur votre temps libre?

Naeda : La majorité du temps, sur notre temps libre, on reste chez nous et on game. Que ce soit Overwatch ou quelque chose d’autres. Sinon dès que c’est la fête de quelqu’un, on sort, on va dans des restos, on s’offre des cadeaux. 

Camille : À Noël, on loue un chalet. Je suis beaucoup plus sociable depuis que j’ai rejoint l’équipe (Rires). 

Naeda : Avant quand je jouais, je connaissais du monde mais uniquement de l’autre côté de l’écran. Je ne les rencontrais jamais. Mais maintenant c’est différent. Non seulement je joue avec ces gens là tout le temps mais je les vois aussi en dehors du jeu. 

Camille : Aussi, quand on prends des filles, il faut s’assurer qu’elles aient une bonne attitude. Parfois il faut sacrifier le skill d’une personne à cause de son comportement. On a eu des joueuses dans le passé qui étaient super douées, mais avec qui ça ne fonctionnait pas niveau personnalité. On passe tellement de temps ensemble qu’il faut qu’on s’entende.

Stéphanie : C’est sans doute pour ça, et c’est vraiment rare, qu’on est la seule équipe québécoise qui joue ensemble depuis trois ans. 

La communauté des gamers est assez difficile en tant que femme. Et vous, comment vous vivez ça?

Camille : C’est sûr que ça arrive. On nous a déjà dit qu’on est juste une bande de filles ou ce genre de truc dans le tchat, mais une fois face à face, ils sont super fins. C’est toujours drôle les endroits comme DreamHack. Une personne hyper-toxique en ligne peut venir nous voir à l’event et être totalement agréable.  

Naeda : On nous a même proposé de sortir pour aller au resto ou boire un verre après un tournoi. Dans le passé, sur Discord, on nous a déjà appelé «Une gang de vagins». Mais, ces gens là, tu les rencontres en vrai, ils font comme si de rien était. Moi je m’en souviens et, je ne vais pas être méchante mais je ne vais pas être ton amie. Je ne m’associe pas avec les gens désagréables. 

Camille : Ça arrive parfois aussi dans le jeux d’avoir des commentaires sexistes. Je suis «support» dans le jeu, donc je suis un peu le stéréotype de la fille qui soigne mais ne se bat pas. Je joue Mercy et c’est mon personnage préféré. Ça m’est déjà arrivé de jouer un autre personnage et on m’a dit que les filles devraient uniquement jouer Mercy sinon ça marche pas. On m’a aussi dit «Juste parce que t’es une fille, je vais pas m’empêcher de te dire que ce que tu as fait n’était pas bon». Mais dis moi le, ça va m’aider à m’améliorer.

Quel conseil vous donneriez aux filles qui ont envie de percer dans l’e-sport comme vous? 

Stéphanie : Une fois par mois on se rencontre à l’Esport Central à Montréal. On hoste des bootcamps gratuits pour les filles. On y fait une petite introduction et initiation à l’e-sport. Y a des filles qui sont parfois très gênées ou qui ont eu une mauvaise expérience, et on aimerait les réintégrer dans l’e-sport.

Camille : On les coache pendant deux heures. On va leur donner des tips sur comment s’améliorer. Il y a beaucoup de personnes qui vont jouer mais qui ne savent pas forcément comment s’améliorer. On peut l’offrir pour Overwatch et Starcraft 2. Pour Starcraft, on a même une soirée chaque vendredi. Puis aussi si quelqu’un est vraiment prête à s’investir, on recrute en ce moment pour les deux jeux. 

Stéphanie, tu disais que vous aviez toutes un emploi à côté? 

Stéphanie : Oui, tout le monde est volontaire. Personne n’est payé. On fait ça durant notre propre temps libre. C’est un gros investissement. 

Est-ce qu’il y a un moyen de gagner un peu d’argent et de devenir professionnelles? 

Stéphanie : Oui comme MissHarvey. C’est un bon exemple. Mais dans la ligue Overwatch, il n’y a qu’une femme qui gagne de l’argent. Dans le niveau juste en dessous (Contender), il n’y a que deux femmes professionnelles. Mais je ne pense pas que ça soit parce que ce sont des femmes qu’elles sont moins bonnes. C’est juste un «number games»: il y a juste beaucoup moins de femmes qui jouent, comparativement aux hommes. Il faut laisser la chances aux plus jeunes filles de jouer, les aider à se développer et réduire le harcèlement.

Quel est le prochain objectif pour Sailor Scouts en tant qu’équipe? 

Stéphanie : On a commencé la team Starcraft 2 cette année. Peut-être que vers la fin de l’année, on pourrait envisager de prendre un autre jeu. 

Camille : On commence petit à petit à faire plusieurs événements pour les femmes dans l’e-sport. On vient juste de commencer donc on n’a pas encore de but concret. On aimerait que la mission devienne de plus en plus connue. 

Naeda : On aimerait surtout garder notre présence sur la scène de l’e-sport au Québec et à Montréal. On est quand même la seule team féminine du Québec. Ça arrive par exemple qu’il y a des LANs et que les équipes se créent uniquement pour un moment puis se séparent. Mais nous, on est la seule team qui reste ensemble. On ne fait pas le podium à chaque fois mais on a une mission commune. Des jeunes filles viennent nous voir pour nous dire que c’est grâce à nous qu’elles ont trouvé le courage de jouer online ou juste parler dans le micro. C’est vraiment ça qui nous motive. 

Quel est votre prochain gros événement?

Camille : On va être au lan ETS en février 2020.

Stéphanie : Chaque année, on fait une levée de fond pour le cancer du sein mais on n’a pas encore tous les détails. 

N’hésitez pas à suivre l’équipe sur leur page Facebook et Discord et à visiter leur tout nouveau site web. Toutes les infos utiles sont listées ci-dessous:

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